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Interviews et Tribunes libres 2021d


Interview de Fabrice Peltier, président de l’INDP

Pouvez-vous nous présenter votre fonction et vos activités en quelques mots ?
Fabrice Peltier : Cela fait maintenant un peu plus de 10 ans que j’ai cédé l’activité de mon agence de design P’Référence pour ne me consacrer qu’au conseil, à l’écriture et à la création artistique. Il s’agissait en quelque sorte d’une reconversion et elle s’est parfaitement déroulée. Fabrice Peltier Création (FPC) est le nom de la structure juridique sous laquelle j’exerce mon activité.


En dix ans je n’ai pas perdu mon temps :
J’ai développé ma méthodologie d’éco-conception Genepack et je l’applique désormais avec de nombreuses entreprises en binôme avec les équipes de Citeo. J’ai finalisé ma méthode d’éco-encrage et édité plusieurs guides dont celui en collaboration avec Citeo. Je forme aujourd’hui à ces méthodologies de nombreuses personnes à la demande de leurs entreprises et je les accompagne dans la définition et la réalisation de leurs projets. J’ai écrit 5 ouvrages, « Le design pour les Nuls », « Quasar Khanh - Designer visionnaire », « L'emballage à l'aube de sa Révolution », « La Révolution de l'emballage - Première période - L'émergence de nouvelles solutions », et le petit dernier qui va sortir début novembre « Pourquoi et comment entrer dans la Révolution – L’emballage ça ne sert à rien ! Sauf… …S’il s’agit d’un juste emballage ». Enfin devrais-je dire, j’ai une activité artistique et créatrice, toujours autour de l’emballage et du recyclage que vous pouvez voir lors de mes expositions ou sur mon site internet : www.fabrice-peltier.fr
. Avec tout ça, comme je m’ennuyais un peu, j’ai trouvé le moyen de me faire élire au conseil municipal de Combloux, pour m’occuper des déchets et devenir membre bureau du Sitom des Vallées du Mont-Blanc. La boucle est bouclée. Je m’occupe réellement de l’emballage du « berceau à la tombe » et je ne m’ennuie plus !
En ce qui concerne l’INDP, l’association que j’ai fondée et que je préside depuis ses débuts, j’ai décidé, lors de la prochaine Assemblée Générale, d’en transmettre le flambeau à un jeune de talent que j’ai eu comme étudiant quand il était encore plus jeune. Je ne vous en dis pas plus, il doit d’abord se faire élire et je lui laisse le soin de se présenter avec sa feuille de route aux membres du CNE…

Vous avez écrit récemment « La Révolution de l’emballage », a quoi doit-on s’attendre dans les années à venir pour définir le Juste Emballage ?
F.P.
: C’est le sujet de mon nouvel ouvrage : « Pourquoi et comment entrer dans la Révolution – L’emballage ça ne sert à rien ! Sauf… …S’il s’agit d’un juste emballage ». Dès la préface que Monsieur Édouard Philippe m’a fait l’honneur d’écrire, le ton est donné, je cite : « Nos usages et nos réglementations ont commencé à évoluer. Il était temps. En tant que Premier ministre, j’ai tenu à ce que la France se dote d’un arsenal législatif efficace et raisonnable pour que nous sortions collectivement de pratiques destructrices. La loi Anti-Gaspillage et pour une Économie Circulaire (AGEC), adoptée le 10 février 2020, comporte de nombreuses mesures sur l’emballage. L’objectif était clair : en finir avec le suremballage et avec l’emballage en plastique à usage unique.  Le décret d’application, dit « 3R », pour « Réduire, Réutiliser, Recycler », publié le 30 avril 2021, s’inscrit dans cette logique. Cette transformation structurelle de notre système de production et de consommation n’est plus négociable. La préservation de nos ressources naturelles, de la biodiversité et du climat en dépend. Toute la chaîne doit se sentir responsable, depuis les acteurs économiques et les centres techniques industriels jusqu’aux consommateurs, sans oublier les collectivités locales. L’emballage représente la 6ème industrie française, c’est-à-dire des métiers, des savoir-faire, des technologies qui ont commencé à évoluer pour que l’emballage du XXIe siècle soit rare, sobre et sûr. Les pratiques ne peuvent devenir vertueuses en un jour. Mais la « révolution » est engagée. Et je suis convaincu que nous allons la gagner. Car aucun retour en arrière n’est possible. »â€¨ Dans ce deuxième ouvrage consacré à la Révolution de l’emballage, je pose les principes de la réflexion qui doit conduire à la création du « juste emballage ». Entre le « trop » et le « pas assez », la « voie du milieu » consiste à appréhender les contraintes des industriels, des différents modes de commerce et les attentes des consommateurs. Pas si simple dans un contexte réglementaire pour le moins touffu et une mutation sans précédent des usages. L’explosion du commerce en ligne, l’appétence pour le vrac et le réemploi en témoignent. Avec « Pourquoi et comment entrer dans la Révolution », j’explique avec clarté, schémas à l’appui, comment l’emballage permet de concilier les contraires. Faire la Révolution, c’est bien joli mais fallait-il encore proposer des solutions et je pense y contribuer. Vous en jugerez en lisant le livre…

Les designers sont présents dans les GT du CNE, quels retours d’information sur les documents qui y sont produits ?
F.P.
: J’ai d’excellent retour de la part des designers présents dans nos GT et je pense que le prochain président de l’INDP va œuvrer pour qu’ils y soient encore plus présents. Ce sera d’ailleurs un des rares conseil que je donnerai à mon jeune successeur lors de mon départ. Le design s’est l’association intellectuelle entre un industriel au cerveau gauche surdéveloppé et un créatif au cerveau droit qui bouillonne. Ensembles, ils tracent la voie du milieu : ce qu’il nous faut pour développer le « Juste emballage ».

Le CNE est à l’écoute de ses adhérents, comment faire plus et mieux pour plus de légitimité/visibilité du CNE ?

F.P.
: Bien justement, ouvrir nos portes à des jeunes et des personnes qui ne pensent pas comme la majorité d’entre nous... Dans ce monde en pleine mutation le CNE ne peut plus se contenter d’être réactif. Il doit être créatif et collaborer avec ceux qui construisent le monde de demain avec toutes leur fougue et leurs utopies ! En tout cas, je peux vous assurer que je vais tout faire pour que le 9ème collège bouillonne et « trublionne ».

Propos recueillis par Le Conseil National de l'Emballage - Octobre 2021d


Question à Fabrice Peltier

Designer et consultant en éco-conception, auteur de la « Révolution de l’emballage »

Fabrice Peltier- Passerelle - La Feef

Passerelle : L’emballage semble être devenu une préoccupation majeure, pourquoi ?

Fabrice Peltier : En effet, je constate tous les jours que les fabricants de produits de grande consommation se posent désormais plus la question de savoir dans quel emballage ils vont conditionner demain leurs produits actuels que d’imaginer quel nouveau produit ou quelle innovation ils vont lancer pour accroître leur business.

Ce nouveau paradigme que je décrivais, dès 2018, dans mon livre « L’emballage à l’aube de sa Révolution » est dû à une très forte pression des consommateurs qui attendent des vrais changements de la part des industriels en matière d’emballage. Ceux-ci souhaitent en finir avec le tout plastique jetable et avoir l’assurance que les emballages soient 100% recyclables.

De plus, pour les industriels qui n’auraient pas entendu les attentes des consommateurs, c’est le nouvel arsenal législatif très contraignant qui vient d’être promulgué et les taxes de plus en plus incitatives qui les obligent à bouger très vite et à faire leur Révolution.
C’est notamment ce qui se passe pour les producteurs de fruits et légumes qui ne pourront plus emballer leurs produits dans des emballages tout ou partie en plastique au-dessous d’1,5 kg à partir du 1er janvier 2022.   

Qu’entendez-vous par « Révolution de l’emballage » ?
F.P.
: Le fait que l’emballage « jetable » que nous connaissons aujourd’hui, conçu pour une distribution quasiment exclusive en libre-service dans des GMS, ne peut plus être le modèle exclusif du commerce contemporain. Il doit changer drastiquement pour être plus respectueux de notre environnement, mais aussi pour répondre aux nouveaux canaux de distribution tels que le e-commerce, le Click and Collect, le Drive, le vrac...

Le commerce évolue. Si hier le consommateur se déplaçait pour aller chercher ses produits dans des rayons de magasins, demain, c’est le produit qui va se déplacer pour être acheminé vers le consommateur. Les emballages pour ce nouveau cheminement sont encore à inventer... 

Quelles sont les premières tendances de cette Révolution et quelles sont les perspectives à venir ?
F.P.
:Nous en sommes qu’au début, dans ce que j’appelle la première période : l’émergence de nouvelles solutions. Tout bouge très vite, chaque solution présente des avantages, mais aussi des inconvénients.
Certains emballages sont déjà sur le marché, d’autres en phase d’industrialisation, ou, pour les plus « rupturistes », encore à l’état de prototype... Comme je le montre dans mon nouvel ouvrage « La Révolution de l’emballage », nous observons un grand retour des papiers-cartons en substitution aux plastiques. Mais aussi une simplification des emballages en plastique pour les rendre 100% recyclables.
L’expérimentation de ces nouveaux emballages va permettre de faire un tri : des solutions s’imposeront et certaines disparaîtront. Cependant, le grand chamboulement reste à venir avec la disparition de l’emballage en plastique à usage unique programmée pour 2040 et la mise en place des emballages réemployables qui va devoir s’organiser entre temps...

Propos recueillis par Passerelle, N°23 - juin 2021d


“L’emballage du futur, c’est tout simplement le juste emballage”
Fabrice Peltier (La révolution de l’emballage)

Vous êtes-vous déjà demandé à quoi ressemblera l’emballage du futur ? Comment il réussira à s’adapter aux attentes des consommateurs, aux législations actuelles et à venir, et surtout, aux nécessaires réflexions environnementales qui animent nos sociétés ?
Pour nous projeter dans cet avenir, nous avons interviewé Fabrice Peltier, designer et consultant en éco-conception, à l’occasion de la sortie de son nouveau livre, La révolution de l’emballage – L’émergence de nouvelles solutions. 
Il nous parle du parcours qui l’a mené au développement de ses méthodologies d’éco-conception et de sa vision de l’emballage du futur.
Prêt à vous projeter dans les dix années à venir ?

Fabrice Peltier- Blog raja

Fabrice, quel a été votre premier rapport à l’emballage, au packaging ?
Aujourd’hui, j’arrive à retracer mon parcours, et à comprendre que tout a commencé dans mon enfance. Il y a plus de 50 ans, j’étais alors un enfant, je vivais à la campagne, entre la Lozère et l’Ardèche. Dans ces petits villages français, à l’époque, le sort du déchet était clair : il finissait souvent abandonné au contrebas d’un virage à la sortie de l’agglomération.
Alors que j’avais à peine dix ans, avec mes frères, nous avions fondé une association pour la protection de la nature. Le week-end, nous nous employions à vider les dépôts sauvages de déchets : c’est là que j’ai eu mon premier contact avec l’emballage. Je ne prenais pas encore pleinement conscience de son impact environnemental : c’était juste des ordures, et je réfléchissais plutôt à comment ne pas me faire mal avec, à ne pas me couper, par exemple, avec des boîtes de conserve rouillées et des morceaux de verre.
Ainsi, j’ai été confronté à une éducation et à un mode de vie proche de la nature, et ai été sensibilisé à la protection de l’environnement, au gaspillage, aux déchets et par voie de conséquence, à l’emballage par ce biais. Ce n’était pas une vie militante, mais plutôt une sensibilité et un mode de vie qui se sont développés très tôt chez moi.

C’est cette enfance qui vous a poussé à vous orienter vers le design packaging ?

Pas réellement. Je n’étais pas mauvais en dessin. J’avais d’ailleurs gagné mon premier concours de dessin, dans les années 70 : c’était un concours organisé par l’UNESCO pour promouvoir la protection de l’environnement, face aux premières catastrophes écologiques. C’est cet attrait pour le dessin qui m’a poussé à faire mes études d’impression et de graphisme à l’École Estienne à Paris.
Je deviens ensuite immédiatement graphiste indépendant. Et c’est là que je commence à vivre l’emballage d’un point de vue professionnel : l’un de mes premiers clients me demande de créer un packaging, et s’en suivent d’autres créations graphiques similaires.
Je prends alors conscience que les emballages, que j’avais identifiés étant enfant comme des déchets… c’était bien moi qui les créais désormais.

Comment vous êtes-vous ensuite orienté vers l’emballage plus respectueux de l’environnement ?
Au début des années 90, on commence à parler de recyclage des emballages. En parallèle, une écologie politique naît ; mais je m’y intéresse peu, tant l’environnement est pour moi une cause a-politique, une valeur plutôt humaniste.
Dès la mise en place d’Éco-Emballages, je m’intéresse au recyclage et j’en deviens un fervent promoteur. J’essaye aussi de répandre très rapidement le message disant que les designers d’emballages sont responsables de l’impact environnemental de leurs créations ; et que, s’ils ne font rien, ils seraient bientôt coupables. En parallèle de mon activité de designer, j’écris des articles, notamment dans Emballage Magazine, mais aussi des livres.
En tant que concepteur d’emballages, j’essayais de m’occuper de l’emballage “du berceau à la tombe” ; mais je me rendais compte que je me contentais en fait “d’habiller le mort”.
Alors, il y a une dizaine d’années, j’ai concrétisé une idée qui était déjà ancienne : me séparer de mon agence, pour devenir consultant en emballage. Je m’étais rendu compte qu’en tant que designer, tout ce que je promouvais en termes d’éco-conception n’était pas assez pris en compte par mes clients. Pour aider les entreprises à faire mieux, je devais prendre un rôle de “conseil”, et non d’ “exécutant-créatif”.
Désormais, je dispense ma méthodologie d’éco-conception à mes clients ; et en parallèle, en tant qu’élu de mon village de Combloux, je m’occupe de la gestion des déchets. J’ai ainsi bouclé la boucle. Je m’occupe réellement de l’emballage “du berceau à la tombe” et espère réellement contribuer à ce que les emballages deviennent de moins en moins problématiques pour l’environnement.

Comment expliquez-vous le retour massif des emballages en papier et en carton dans les usages actuels des entreprises ?
Ce n’est pas tant que les entreprises se tournent massivement vers ces types d’emballages : elles se détournent avant tout du plastique. Cette prise de conscience que le plastique était nocif pour l’environnement a été essentiellement déclenchée par la mise en valeur des plastiques marins, qui envahissent nos mers. Cette notion touche deux items très importants pour l’humain : la manière dont le plastique impacte les animaux, et celle dont il nuit à la santé humaine.
C’est ce plastic bashing, renforcé par des législations qui semblent viser essentiellement le plastique, qui pousse les entreprises à se diriger plutôt vers le papier et le carton, pour minimiser l’utilisation du plastique.
Ceci étant, malheureusement, en réalité, il y a toujours plus de communication autour de ces initiatives d’éco-emballage que de faits concrets…

À votre sens, l’emballage en plastique va-t-il totalement disparaître des pratiques des entreprises ?
Aujourd’hui, il est difficile, voire impossible, de se passer du plastique. Le plastique est devenu indispensable dans nos vies, et on n’a pas encore trouvé de solution de rechange. Par exemple, sans plastique, pendant cette pandémie de Covid-19, nous aurions peiné à nous en sortir : seringues, doses de vaccin, protections des personnels soignants, respirateurs… tout est en plastique !
Pour revenir à l’emballage, il faut comprendre que le plastique n’est pas le problème en tant que tel. Le souci est plutôt un problème d’usage du plastique, et notamment son usage unique. Les entreprises se posent encore trop la question de “comment utiliser le plastique”, plutôt que de “pourquoi l’utiliser”. Tout ceci les mène à surprotéger, suremballer, surconsommer cette matière.
En somme, les entreprises utilisent du plastique dans leurs emballages comme elles créeraient des fusées Ariane pour aller chercher leur pain au bout de la rue ! Et ces emballages en plastique ont de telles capacités de protection et de résistance (pas forcément utiles), qu’ils se retrouvent dans la nature, et y restent.
Selon moi, le plastique ne va pas disparaître, mais son utilisation doit être totalement remise à plat :
•    D’un côté, les industriels doivent se poser la question du réel besoin de protection de leurs produits. Par exemple, a-t-on réellement besoin d’enveloppes avec du calage bulle plastique ? Il s’agit d’éviter une utilisation “surfonctionnelle” du plastique.
•    D’un autre côté, le consommateur doit également se poser la question de s’il a réellement besoin de ces emballages plastiques. Cette réflexion se fait seulement aujourd’hui au moment où il jette son emballage : sa réflexion doit remonter au moment où il achète.
C’est donc aux industriels autant qu’aux consommateurs de se remettre en question.

Quelles sont selon vous les grandes tendances de l’emballage les plus prometteuses pour l’avenir ?
J’en parle dans la première période de La révolution de l’emballage : cette révolution amène plusieurs tendances intéressantes.
Ainsi on voit émerger le développement de matériaux d’origine renouvelable (par exemple, les plastiques faits à partir de cellulose), ou encore les matières recyclées.
Cette révolution a sonné le glas de l’emballage non-recyclable. Demain, il sera impossible de créer un emballage ne pouvant être recyclé. Mais ce n’est pas le fondement de cette révolution en soi.
Cependant, les tendances qui vont véritablement révolutionner l’emballage sont celles qui mettent fin à la notion d’usage unique. L’objectif doit être de complètement réinventer l’emballage autour de la notion d’usage multiple, de réemploi.
Mais d’autre part, cette tendance du réemploi touche aux problématiques des nouveaux modes de distribution. L’emballage à usage unique avait un sens pour la vente en réseau (d’hypermarchés, essentiellement), où le consommateur allait vers le produit. Désormais, c’est de plus en plus le produit qui va vers le consommateur.
C’est ainsi que l’on voit émerger des leviers qui vont dans le sens de cette révolution : le développement de matériaux d’origine renouvelable (par exemple, les plastiques faits à partir de cellulose), ou encore les matières recyclées.
En somme, les tendances les plus prometteuses ne sont pas les emballages eux-mêmes, mais les nouvelles manières d’emballer, dans des conditionnements réemployables.

Votre livre parle de « la première période de la révolution de l’emballage ». Quels seront, selon vous, les grands axes de la période suivante de cette révolution ?
L’année prochaine sortira la deuxième partie de mon ouvrage : elle aura pour sous-titre L’expérimentation de nouveaux modèles. Ainsi, la deuxième période de cette révolution consistera à expérimenter certaines des solutions dont je parle dans le premier livre, pour savoir lesquelles doivent être développées massivement.
Expérimentation des modèles de réemploi, de nouveaux modèles d’emballages, de nouveaux systèmes de distribution… Tout ceci demande de laisser le temps au temps ! On va sans doute voir émerger de nouvelles solutions d’emballage ; mais on arrive surtout à un moment où il faut que l’on teste, qu’on voit les résultats de ces solutions, pour choisir ce qui fonctionne réellement.

Si vous deviez décrire l’emballage du futur en quelques mots, comment le décririez-vous ?
L’emballage du futur sera forcément…
•    Recyclable
•    Recyclé (soit fait à partir de matière recyclée)
•    Léger
•    Et aura les mêmes fonctionnalités que l’emballage d’aujourd’hui
Mais j’aimerais aller plus loin : l’emballage du futur, c’est tout simplement “le juste emballage” : le juste matériau, la juste quantité… Aujourd’hui, nous vivons dans l’époque du “sur” : surfonctionnalité, suremballage, surconsommation… Notre but doit être de remplacer le “sur” par le “juste”. Et c’est d’ailleurs ce dont parle le livre que je sors en septembre, qui s’intitule L’emballage, ça sert à rien ! sauf…

Quels conseils pourriez-vous donner à une entreprise qui souhaite mener une réflexion poussée sur l’avenir de ses emballages ?
Tout d’abord, je conseillerais d’arrêter de prendre des décisions en silos. Il est nécessaire de mettre tous les services de l’entreprise autour d’une même table, et de travailler tous ensemble autour d’une méthodologie solide. Cela permet d’éviter les transferts entre les différents pôles.
Mais surtout, je leur conseillerais de mener leur réflexion avec une réelle conviction. Car, si l’on part du principe que l’emballage plus respectueux de l’environnement est un avantage concurrentiel, qu’il s’agit d’une demande des consommateurs, ou que la loi nous le demande… on part nécessairement avec un handicap. Il faut avancer avec un véritable engagement, qui permet de prendre les bonnes décisions.

Quels sont vos prochains projets ?
En septembre sort mon nouvel ouvrage, L’emballage, ça ne sert à rien ! sauf…. Le titre est provocateur, mais l’idée est surtout de promouvoir le “juste emballage”, dont nous avons parlé auparavant.
Je souhaite expliquer ce concept, et donner les clés pour développer le “juste emballage” : celui pour le produit vendu emballé, celui pour le produit proposé en vrac, vendu par correspondance, pour la restauration, mais aussi le “juste zéro emballage”, car ce n’est pas parce que le consommateur final ne voit pas l’emballage que ce dernier n’a pas été nécessaire pour lui donner accès au produit… J’y rappelle toutes les fonctions de l’emballage, toutes ses obligations ; puis je propose une méthodologie pour développer ce “juste emballage”.
En parallèle, en tant que consultant, je continue à accompagner beaucoup d’entreprises. C’est mon vrai métier, avant d’être auteur : j’accompagne de grands groupes et des PME à faire leur transition emballage comme il se doit

Propos recueillisle Blog Raja - le 24 juin 2021d

Emballages, une révolution en cours

Les usages, la réglementation et les attentes des consommateurs ont indiqué la voie à suivre, et des échéances sont arrêtées. Pour les atteindre, des progrès sont nécessaires, tant dans l’écoconception que dans les techniques de recyclage.

Fabrice Peltier- La Voie des MarquesLa Voix des Marque : Vous écrivez que « nous sommes dans la première période de la révolution de l’emballage ». Quelles sont les bastilles à prendre ?  
Fabrice Peltier :
En ce début de révolution, celui qu’on accuse de tous les maux, « l’aristo » qu’on doit mettre à la lanterne, c’est le plastique. Non pas tant le plastique en lui-même que les déchets qu’il génère, qui s’accumulent dans les océans et qui seront bientôt plus nombreux dans les eaux que les poissons... 

Cette révolution passe-t-elle par plus de normes ? 
F. P. :
Je dirais plutôt que ce sont les règlementations françaises et européennes promulguées depuis peu de temps qui l’ont déclenchée. J’en parlais en 2018 lorsque j’ai écrit L’Emballage à l’aube de sa révolution. Cet ouvrage annonçait les demandes d’interdiction de mise sur le marché de certains emballages. Auparavant, on arrêtait de bonnes pratiques et des taux à atteindre, les lois n’étaient pas très contraignantes : elles portaient essentiellement sur la réduction à la source et des objectifs de taux de recyclage. Avec la directive européenne sur les plastiques à usage unique (dite « SUP » ou single-use plastics) et la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (loi AGEC), le couperet est tombé sur certains emballages, et ce n’est qu’un début. Ce sont ces interdictions de mise sur le marché qui sont révolutionnaires, puisqu’un certain nombre d’industriels sont aujourd’hui obligés de changer leur méthode de production. En effet, très peu de produits, particulièrement dans l’alimentaire, existent sans emballage. L’industrie agroalimentaire fabrique essentiellement des produits emballés ; sans emballage, peu de denrées arrivent intactes dans l’assiette des consommateurs. Aussi, l’interdiction de certains types d’emballage sur certains marchés incite les industriels a entamer leur révolution, au risque de disparaître. Le temps des bonnes intentions est terminé, d’autant que de nouvelles règles et contraintes ne vont pas tarder à arriver pour appeler à accélérer le mouvement... 

Le coût économique global de cette révolution pour une entreprise peut-il vraiment être connu ?
F. P. : Pour celui qui ne fera rien, il sera catastrophique, car il débouchera sur une interdiction de commercialisation. Pour les autres, il y aura à l’évidence un coût économique, mais ce sera un investissement pour assurer la continuité et un meilleur avenir. La plupart des entreprises ont un cycle de production avec un système d’emballage qui est, sur le plan économique, très bien calibré, parfaitement optimisé. On peut comprendre qu’elles n’aient pas envie de changer ce qu’elles ont mis des années à mettre au point et qui est parfaitement rodé. Cependant, trois autres facteurs de la vie de l’emballage doivent être pris en compte : la distribution, la consommation et la fin de vie.
La distribution est aussi en pleine mutation. Les emballages actuels ont été conçus pour un type de commerce, le modèle du supermarché et de l’hypermarché. L’essor de la vente par Internet, du drive, du vrac, des magasins de proximité, s’accentue, avec des emballages qui ne correspondent pas à leurs contraintes. Ces nouveaux canaux n’ont pas d’autre choix d’emballages que ceux de la grande distribution. Deuxième changement : qu'elle soit réelle ou bâtie sur des rêves, la perception qu’ont les consommateurs des produits emballés a basculé vers le « moins », voire pour certains vers le « zéro emballage ». On leur demande depuis vingt-cinq ans de trier leurs emballages pour qu’ils soient recyclés. Ils ne comprennent pas pourquoi certains emballages en plastique ne sont pas recyclés et se retrouvent dans la nature. Ils déplorent que la majorité des emballages en plastique ne soient pas recyclés. Ils réclament donc la fin des emballages non-recyclables. Enfin, la poubelle, dernière phase de vie de l’emballage : les emballages non-recyclables vont être de plus en plus taxés, puis interdits. Entre-temps on va peut-être obliger
les industriels à communiquer sur la recyclabilité de leurs emballages... 

La transition est-elle freinée par des idées fausses sur certains matériaux. Le carton, par exemple, est-il responsable de la déforestation ?
F. P. :
On sait depuis longtemps que les papiers-cartons ne sont pas responsables de la déforestation. Ils sont produits à partir de forêts éco-gérées. Leur production n’induit pas de coupes franches de forêts ; et ce n’est pas à partir des parties nobles du bois qu’on récupère les fibres. Il circule également beaucoup d’idées fausses sur les agro-matériaux, la biodégradation... Chacun y va de son slogan pour sauver la planète. 

Les consommateurs sont-ils attachés à un matériau d’emballage en particulier ?
F. P. : On note depuis longtemps que les matériaux d’emballage qui ont la meilleure image sont le verre et le papier-carton, car ils sont les plus recyclables et les plus recyclés. Cependant, pour la quasi-totalité des consommateurs, un emballage respectueux de l’environnement est un emballage 100% recyclable. 

Certains produits voient-ils leurs ventes baisser en raison d’un emballage qui séduirait moins les consommateurs (plastiques recyclés présentant moins d’éclat et de couleur) ?
F. P. : Je ne connais pas d’étude qui le démontre. Par contre, certaines montrent que les emballages à l’apparence recyclée (kraft et couleur verte, plastiques grisés munis d’explications) sont associés dans les esprits au respect de l’environnement. Il s’agit de nouveaux codes, de nouveau aspects qui vont se faire accepter sans problème. Le consommateur ne demande pas des emballages blancs ou immaculés, il ne demande pas de la transparence sur tous les produits. Quand Barilla a enlevé en Angleterre la fenêtre sur ses emballages, ne laissant que la photo du produit, ses ventes n’ont pas diminué. 

Fabrice Peltier - La Voie des MarquesIl semble que chaque matériau ait ses avantages et ses inconvénients. Les papiers-cartons ont vu leur usage progresser grâce à l’e-commerce, mais devraient être « plastifiés » par nécessité pour réaliser une barrière étanche ; un emballage primaire souple n’étant pas « autoporteur » nécessiterait un emballage secondaire...
F. P. : La composition d’un emballage dépend du type de produits qu’il contient et des fonctions qu’on souhaite lui faire remplir. Un monde sans plastique dans l’emballage, ce n’est aujourd’hui pas possible. Mais un avenir proche avec beaucoup moins de plastique est tout à fait envisageable. Il n’existe pas une solution unique de substitution, mais de nombreuses pistes qui permettent d’arriver au « juste emballage » : un emballage éco-conçu pour exécuter sa mission sans surenchère. Il peut être en carton, en plastique ou complexe, car des emballages en papier-carton qui contiennent des produits gras ou liquides doivent être plastifiés. Les matériaux sont destinés à vivre ensemble, et dans tous les cas il faut en utiliser un minimum, si possible recyclés et 100% recyclable. 

Le tout recyclable : un vœu pieu ?
F. P. :
Pas un vœu, et bientôt une obligation. En 2030, les emballages non-recyclables seront interdits par la Commission européenne. Les industriels n’ont pas d’autre choix que penser « 100% recyclable ». Pour cela, il faut faire de la « recyclo-conception », c’est-à-dire concevoir des emballages faciles à recycler pour qu’ils soient effectivement traités par l’industrie du recyclage. Par exemple, moins on a de pièces qui composent l’emballage, plus le recyclage est facilité, car la phase de séparation préalable est réduite. Quant aux matériaux complexes, ils vont effectivement poser des problèmes : nous atteignons là les limites du recyclage mécanique, et nombreux sont ceux qui attendent le recyclage chimique. 

De nouvelles technologies vont-elles permettre de rendre dissociables les matériaux dont l’amalgame empêche le recyclage ?
F. P. : Oui, mais nous en sommes aux balbutiements, dans la phase de la recherche-développement et des prototypes industriels. Mais ce ne sont pas les progrès de recyclage qui vont régler le problème du recyclage, car ce sera toujours plus cher et pas forcément bénéfique pour l’environnement. C’est avant tout la conception de l’emballage à recycler qui va le faciliter ou non. Il faut choisir le bon sens. Les technologies n’interviennent que pour recycler plus et mieux. 

Nous ne recyclons que 25% des emballages plastiques. L’objectif de 50% fixé par Bruxelles pour 2025 est-il à notre portée ? 
F. P. :
Actuellement 50% des emballages plastiques ne sont pas recyclables, et sur les 50% restant, seule la moitié est effectivement recyclée. Il faut donc interdire les 50% qui ne sont pas recyclables et améliorer le retraitement de ceux qui le sont. Va-t-on y arriver en 2025, j’en doute. 

Mieux considères que le plastique, le verre, l’acier et l’aluminium pourraient, selon vous, ne pas échapper au « vent de la révolte ». Pour quelles raisons ?
F. P. :
Dans la première période de la révolution, c’est le plastique qui est visé. La deuxième période est déjà tracée par la loi AGEC, avec l’interdiction en 2040 des emballages plastiques à usage unique. Mais est-ce le plastique qui est visé, ou l’usage unique ? Même s’il est censé « simplifier la vie », l’usage unique n’est pas toujours justifié. Il va falloir s’interroger sur les emballages qui pourront être réemployés, consignés ou non. Cela va obligatoirement concerner le verre, le métal et l’aluminium, qui sont utilisés dans des emballages à usage unique. Mais ce sera aussi une opportunité pour le plastique qui, à l’image de Tupperware, sait réaliser des contenant à usage multiple depuis le siècle dernier. 

Quels sont l’avenir et le périmètre envisageables pour la consigne en grande distribution ?
F. P. :
On associe le réemploi à la consigne, mais on peut avoir l’un sans l’autre. Il y a deux types de consignes : la consigne pour recyclage, comme en Suède ou en Finlande, ou? le consommateur paie et est remboursé quand il rapporte l’emballage pour qu’il soit recyclé ; et la consigne pour réemploi, quand le consommateur rapporte l’emballage pour qu’il soit récupéré pour être nettoyé et rempli à nouveau par un industriel. Dans ce cas, c’est tout un réseau à mettre en place, car il faut organiser la logistique pour rapporter les emballages, les nettoyer et les livrer chez l’industriel. La consigne et le réemploi vont, pour un certain nombre de produits, connaitre un essor, car la loi impose d’atteindre  5% des emballages utilisés réemployés en 2023 et 10% en 2027. Mais cela ne peut pas concerner tous les produits ni tous les circuits de distribution.

Propos recueillis par Jean Watin-Augouard, La Voix des Marque, Printemps 2021d 

 

« Il va falloir admettre que certains emballages en plastique ne sont pas justifiés »

Auteur du livre « La Révolution de l’Emballage », Fabrice Peltier, designer et consultant, prépare déjà le second volet de cette analyse. Qui fera la part belle à trois grands enjeux : la clarification de la fin de vie des biosourcés, la véritable utilité des plastiques à usage unique et le réemploi. Interview.

Process Alimentaire : Intitulé « L’émergence de nouvelles solutions », la première partie de votre Révolution de l’Emballage dresse l’étendue des pistes d’éco-conception qui sont déjà disponibles ou qui se profilent sur le marché. Face à toutes ces options, comment faire un choix ?
Fabrice Peltier : On m’appelle souvent pour me demander quel est l’emballage idéal. Je réponds qu’il ne faut pas se focaliser sur l’emballage mais sur le couple contenant/contenu, sur toute la chaîne. Cela ne sert à rien, par exemple, de copier son concurrent en matière d’éco-conception car ses contraintes de production, de transport, de distribution sont peut-être différentes. Et auront un impact sur la conception de l’emballage qu’on vend en palettes ou pas, qu’on exporte ou pas, etc. La seule façon de procéder est d’appliquer une méthode d’éco-conception pour chaque application, Génepack par exemple, en faisant un streaming complet sur toute la chaîne pour éviter les transferts d’impact.

Au risque, peut-être, de choisir une option dont l’Analyse de Cycle de Vie (ACV) soit moins favorable ?
F.P. : Sur ce point, ma philosophie est claire : il faut se détendre sur la question du carbone dans l’emballage ! Dans la plupart des produits alimentaires, exception faite des liquides, l’impact carbone du contenant représente 5 à 8 %. Vouloir réduire l’impact carbone de l’emballage c’est travailler sur l’épaisseur du trait. Il ne faut pas s’arrêter à un seul indicateur. Et se dire aussi que, s’ils sont moins disant que le plastique, qui est plus léger, les matériaux alternatifs sont nouveaux et pas encore optimisés. On a 10 à 15 ans de recul sur les plastiques. Il y a quelques années, les bouteilles d’eau pesaient trois fois plus lourd qu’aujourd’hui. Il n’est pas incongru de penser que les matériaux renouvelables réduiront leur impact dans les années à venir.

Avec la fin annoncée des ressources fossiles, ces matériaux alternatifs listés dans votre livre (à base d’algues, de co-produits de l’agriculture ou de l’agroalimentaire, intégrant de la craie, etc.) sont pour vous de vraies pistes d’avenir. Mais pas avec le compostage ou la biodégradation comme fin de vie. Pourquoi ?
F.P. : Cela va être le vrai sujet des mois aà venir. Ces matériaux alternatifs qui utilisent des sciures de bois, des pelures de patates, etc., en général en composite avec des polypropylènes ou des polyéthylènes d’origine fossile ou végétale, sont vus d’un bon œil. Et se sont engouffrés dans la voie du compostage industriel ou domestique. Seulement, pour moi, seuls les produits qui poussent dans la nature peuvent retourner à la nature. La nature n’a pas été programmée pour détruire ce qu’elle n’a pas produit, à un rythme qu’on lui donne. Est-ce raisonnable de faire retourner à la terre des produits qui contiennent des encres, peut-être des huiles minérales ou d’autres substances nocives ? Alors même que les fabricants font la chasse au milligramme de pesticides dans leurs produits alimentaires ?

Quelle est alors la voie d’avenir pour ces matériaux alternatifs ?
F.P. : Le réemploi, la réutilisation, le recyclage, là ce sont des fins de vie qui permettront de ralentir l’overshoot day (ndlr : date à partir de laquelle la Planète consomme plus de ressources qu’elle n’en produit). Je milite plutôt pour la révolution du recyclage, dans laquelle les emballages deviennent eux- mêmes des co-produits, à l’exemple du polyal issu de l’alliage plastique/aluminium des briques de lait ou de jus. J’ai installé du mobilier en polyal dans ma commune à Combloux : il ne bouge pas, là où une chaise en PE a une durée de vie de trois ans. Je crois à ce que certains appellent maintenant l’up-cycling, qui n’est autre que le recyclage historique. Regardez comme ça peut être intéressant de réintégrer des coquilles, des poussières de craie, etc., pour fabriquer d’autres matériaux. Ramener la matière à zéro, en boucle fermée, comme va le permettre le recyclage chimique ne sera pas une solution pour tout.

Concernant les plastiques, vous appelez à un changement des mentalités. Lequel ?
F.P. : La première révolution des plastiques qui consiste à les rendre recyclables, en développant des mono-matériaux est déjà en cours. Demain, il faudra admettre que certains emballages en plastique ne seront tout simplement ni justifiés ni essentiels. En RHD, par exemple, c’est quand même insensé de se dire qu’on nous sert une salade dans un emballage en plastique qu’on va, au pire, jeter au bout de dix minutes si on mange sur place, au mieux au bout de 20 minutes si on l’emmène au bureau. C’est comme si on allait acheter son pain au bout de la rue en hélicoptère ! C’est le sens de l’interdiction de certains emballages par le règlement SUP (single use plastic), mais il va falloir continuer à légiférer pour arriver à une utilisation du plastique vraiment nécessaire.

Quelles solutions pour ces marchés ?
F.P. : Proposer des emballages réemployables ou en tous cas moins sophistiqués, peut-être sans couvercle. Prenons un tout autre exemple, celui des pompes de parfum. Un fournisseur m’a confirmé qu’elles supportaient jusqu’à un million de pressions, sauf que le flacon est vidé et jeté au bout de 30 000 pressions seulement. C’est l’inverse de l’obsolescence programmée ! Brune Poirson, qui préface mon livre, a eu le courage de légiférer sur le sujet dans l’objectif de transformer le système productif pour mettre la préservation des ressources naturelles en son cœur. Il faut arrêter ces pratiques et se redemander, si je devais concevoir mon produit aujourd’hui, est-ce que ce serait raisonnable que je le refasse de la même manière ? Tous les produits ont aussi été conçus pour être distribués en grande distribution. Mais ces couples produits/emballages sont-ils adaptés aux autres circuits de distribution ? Il faudra inventer les emballages pour tous les secteurs.

Votre seconde Révolution va aussi faire la part belle au réemploi. Une autre illustration des mentalités qui évoluent du tout jetable vers le réutilisable ?
F.P. :
Clairement. Le réemploi, ce n’est pas juste un emballage, c’est tout un système logistique à créer. Il ne sera peut-être pas aussi vertueux qu’on l’espère au démarrage mais n’oublions pas que ça peut remplacer des emballages qui bénéficient de 20 à 30 ans d’incrémentation. Le réutilisable, qui consiste à trouver un nouvel usage à son emballage a aussi du sens. Certains diront que c’est un retour en arrière. C’est plutôt un retour aux sources. Tout ce mouvement est enclenché, on ne reviendra justement plus en arrière.

Karine Ermenier, Process Alimentaire, le 4 janvier 2021d 

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